Chlordécone : une aumône ?

Chlordécone : une aumône ?

Chlordécone : le gouvernement débloque une aide de 5,4 millions d’euros. Nous fait-il l’aumône ?

« Il ne faut pas dire que le Chlordécone est cancérigène ».

Tout le monde se rappelle de cette déclaration du Président de la République Emmanuel MACRON lors de son passage en Martinique

Elle avait suscité un grand émoi. L’Élysée avait choisi de répondre à ce mensonge présidentiel par le biais d’un communiqué expliquant un « malentendu ». Toujours est-il que le député Serge LETCHIMY a obtenu la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire sur les conséquences sanitaires, environnementales et économiques de l’utilisation du Chlordécone mais aussi du Paraquat aux Antilles.

La santé des martiniquais compte-t-elle vraiment ?

Rappelons que le Chlordécone a été utilisé en Martinique pour lutter contre les maladies des bananiers. Et ce même chlordécone a été interdit dès 1977 aux États-Unis, en 1990 en France, et seulement en 1993 aux Antilles.

Je dois avoir l’esprit mal tourné. Santé neg paka konté pou sé moun tala… En tout cas, quelle fut ma surprise d’entendre la Ministre des outremers Brigitte GIRARDIN annoncer une aide de 5,4 millions d’euros pour favoriser la lutte contre le Chlordécone aux Antilles. Autrement dit, en Guadeloupe et bien sûr chez nous en Martinique. Soit 5,4 millions d’euros pour environ 800 000 habitants. Cette annonce a été faite en présence de nos parlementaires, de nos exécutifs et des représentants des ministères des solidarités et de l’agriculture.

Finalement, oui, c’est cancérigène et le gouvernement nous fait l’aumône

Ces 5,4 millions d’euros devraient permettre de tendre vers le zéro Chlordécone dans l’alimentation. Ils permettraient aussi de renforcer les contrôles et d’accompagner les filières agricoles. Est-il utile de rappeler ici qu’il y a 25 ans, les États-Unis ont consacré 2 milliards de dollars pour décontaminer les sols, soigner et indemniser les populations victimes du produit ? Evidemment,les territoires concernés sont bien plus grands que les nôtres. Cependant, faire des plans de 5 millions d’euros alors qu’il y a tant de choses à faire chez nous :  dépolluer, faire de la recherche, permettre à la population de pouvoir faire des tests médicaux pour connaître son taux de contamination, indemniser les agriculteurs malades, etc…

Pourquoi ai-je l’impression qu’une fois encore, nous sommes les dindons de la farce ? Pourquoi ai-je encore l’impression qu’on nous fait l’aumône ? Mettre en place une telle communication ministérielle pour nous distribuer des miettes ? 5,4 millions d’euros. Notre santé compte-elle ? Y a-t-il une volonté de trouver de vraies solutions qui nous permettraient de manger sain ? Tout le monde sait que certains produits sont très contaminés. Et ce sont eux qui sont particulièrement consommés par les populations les plus en difficultés parce qu’elles s’approvisionnent sur les circuits informels (autoproduction, dons, ventes en bord de route). 5,4 millions d’euros pour accompagner les particuliers pour effectuer des diagnostics des sols chez eux, mais aussi pour augmenter les contrôles des circuits informels. 5,4 millions d’euros à se partager entre la Martinique et la Guadeloupe.

Ai-je besoin de répondre à la question que j’ai posée au début ? J’ai bien peur que non…

 

Valérie VERTALE-LORIOT